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Le groupe de travail "Cancers et SHS"
Créé en 2012 au sein du Réseau des jeunes chercheur-e-s santé & Société (http://www.reseau-sante-societe.org/), le groupe de travail "cancers et SHS" constitue un espace d’échanges scientifiques pluridisciplinaire autour de la thématique "cancers". Il est animé, à l'heure actuelle, par une quarantaine de membres (masterant-e-s, doctorant-e-s, post-doctorant-e-s) d’appartenances disciplinaires variées (sociologie, anthropologie, histoire, géographie, psychologie sociale et lettres) localisés sur tout le territoire français. Ses activités visent à favoriser la sociabilité et la socialisation nécessaires à la création de projets de recherches communs et indispensables à la professionnalisation des jeunes chercheurs, à travers l'organisation d'événements scientifiques réguliers. Le groupe a ainsi été à l'initiative de 6 journées d'étude entre 2012 et 2014 sur des thématiques transversales aux travaux de ses membres (Catégorisations, Trajectoires et temporalités, Genre et sexualité, Recherche interventionnelle et Mobilisations individuelles et collectives)
Le colloque
Le colloque sur La Production des subjectivités dans le domaine du cancer est porté par le groupe de travail "Cancers et SHS" du Réseau des jeunes chercheurs Santé & Société, avec le soutien du Campus Condorcet, de l'Institut National du Cancer et de la MSH Paris-Nord. Son propos est de revisiter, à la lumière d'évolutions récentes dans le domaine du cancer, certaines notions classiques en SHS autour de la question des subjectivités. Par là, il vise à poursuivre l'ouverture des travaux du groupe à des chercheurs plus expérimentés, afin de favoriser les échanges au sein de la communauté scientifique travaillant sur le cancer.
Lieu : Salle des conférences Maison des Sciences de l'Homme Paris-Nord, 4 rue de la Croix-Faron, 93210 St-Denis
Inscriptions : En raison du nombre de places limité, l'inscription est obligatoire (onglet "s'inscrire" ci-contre) Date limite des inscriptions : 30 mai 2014
L'argumentaire
S’il est un mot d’ordre qui semble, depuis plusieurs décennies, faire l’objet d’un large consensus social dans l’univers médical, c’est celui d’« humanisation des soins », qui trouve son corollaire dans le fait de « placer le malade au centre » du système de santé. L’émergence de certaines spécialisations en cancérologie (médecine de la douleur, soins palliatifs, onco-gériatrie, etc.) témoigne de cet intérêt croissant pour une prise en charge médicale plus « individualisée ». Leur diversité démontre également l’hétérogénéité de ce mouvement. Pour reprendre une question d’Isabelle Baszanger (1995), il s’agirait d’« une médecine centrée sur la personne, mais quelle personne ? ». Par-delà les débats théoriques ou juridiques sur les concepts de « personne humaine » ou de « sujet », le propos de ce colloque est d’interroger les processus contemporains de production des subjectivités en cancérologie. Partant de l’idée, développée par Biehl, Good et Kleinman (2007), que les subjectivités sont constituées à l’interface entre des processus socio-culturels et les perspectives individuelles, entre des déterminants sociaux extérieurs et leur reprise réflexive intérieure, entre gouvernement et subjectivation, il s’agira d’explorer les modalités concrètes et les dispositifs à travers lesquels la question du sujet de soin est posée en cancérologie. Cette problématique sera déclinée selon trois axes principaux :
1) Les ambivalences de l’autonomie Depuis longtemps, le principe d’autonomie a fait l’objet d’une valorisation visant à rééquilibrer la relation médecin-patient contre un certain paternalisme médical. La prise en charge du cancer n’échappe pas à ce mouvement. Cependant, qu’en est-il dans un contexte de soins hautement technicisés, conduisant à une chronicisation croissante de la maladie, où les risques et bénéfices des traitements demandent à être réévalués en permanence ? Nous souhaitons interroger à la fois les différentes formes de promotion de l’autonomie (consentement éclairé, éducation thérapeutique, coordination des soins par le malade et son entourage, etc.) et les différentes postures profanes auxquelles elles donnent lieu (tactiques de résistance ou de contournement, mobilisations collectives, coopérations, etc.), afin de mieux comprendre de quelles manières cette autonomie est négociée entre les acteurs et quels en sont les enjeux en terme de redéfinition des rapports de pouvoir entre soignants et soignés.
2) La prégnance des mondes psy Dans le contexte actuel de valorisation de la composante affective des soins, l’attention portée à la subjectivité des malades a fait l’objet de ce que certains ont appelé une psychologisation ou une psychiatrisation. Les activités de dépistage et de traitement d’un « désordre » ou « trouble » psychique en cancérologie font cependant l’objet de catégorisations et d’usages variables selon les contextes de soin et les spécialités professionnelles impliquées (psycho-oncologie, psychologie clinique, soins infirmiers, etc.). Elles peuvent aussi être investies par des patients susceptibles de repérer en eux-mêmes des formes de « déviance émotionnelle » (Thoits, 1995) les conduisant à rechercher des modèles explicatifs (étiologies profanes, catégories cliniques, etc.) et à recourir à divers dispositifs thérapeutiques (pratique sportive, groupes d’auto-support, psychothérapie, etc.). L’hétérogénéité de ces activités invite à s’intéresser aux diverses modalités de leur articulation (conflits de normes, rapports de sens, hiérarchisation des pratiques, etc.).
3) Les politiques de l’expérience La dynamique de personnalisation des soins traduit l’attention contemporaine portée à l’expression de la subjectivité dans des dispositifs innovants ou plus traditionnels. Aux différents cadres de sollicitation de l’expérience des patients et des professionnels (groupes de parole, consultations dédiées, projets personnalisés de soin, questionnaires, etc.) s’ajoutent des mobilisations collectives de malades ou de proches à partir de leur vécu (mouvement de malades, activités associatives, « patients experts », forums de discussion sur internet, etc.). Dans ce contexte, il s’agit d’interroger les différents modes de construction de l’expérience individuelle (à travers les récits, les engagements publics, les représentations et les normes sociales, les enjeux de pouvoir, etc) au regard des pratiques normatives et organisationnelles des dispositifs de santé. Les questions soulevées pourront inciter à réfléchir à la diversité des usages, dans le domaine du cancer, de l’idée selon laquelle « il n’y a pas d’expérience qui ne puisse être mise en mots » (Rossi, 2011).
Bibliographie
Baszanger I. (1995), Douleur et médecine. La fin d'un oubli, Paris, Seuil. Biehl J., Good B., Kleinman A. (2007), « Rethinking subjectivity » in Biehl J., Good B., Kleinman A. (dir.), Subjectivity. Ethnographic investigations, Berkeley and Los Angeles, University of California Press, p.1-24. Rossi I. (2011), « La parole comme soin : cancer et pluralisme thérapeutique », Anthropologie et Santé [En ligne], 2 | 2011, mis en ligne le 27 mai 2011, consulté le 10 janvier 2014. URL : http://anthropologiesante.revues.org/659 Thoits P.A. (1985), « Self-labeling processes in mental illness : the role of emotional deviance », American Journal of Sociology, vol.91, n°2, p.221-249.
Le comité scientifique
Philippe Bataille (Cadis, EHESS) Hélène Cléau (LASA, université de Franche-Comté) Guy Lebeer (Metices, Université Libre de Bruxelles) Samuel Lézé (ENS-LSH, Lyon) Anaik Pian (LCSE, Université de Strasbourg) Anne Vega (Sophiapol, Université Paris 10)
Le comité d'organisation
Benjamin Derbez (Iris, Université Paris 13) Natasia Hamarat (Metices, Université Libre de Bruxelles) Hélène Marche (HCTI, Université de Bretagne Occidentale) Thibaud Pombet (Cadis, EHESS) |